La veille, talon d’Achille des PME innovantes

13 10 2006

Les dispositifs qui, au sein des Programmes cadres de recherche et développement européens, visent spécifiquement les PME comblent une importante brèche dans le paysage européen de la recherche : sans eux, ces entreprises ne seraient tout simplement pas en mesure de mener leurs projets, selon un rapport récemment publié par le European Policy Evaluation Consortium (EPEC).

For most of the projects (confirmed by the survey) the technical objectives are achieved. This is not the case for the economic objectives, the achievement of which is sometimes hindered by competing technology-market combinations that emerged during the course of the project but were not anticipated by the project consortium. Also, several projects lead to innovation, but there is a lack of regulation that would help to create the market corresponding to the products or processes developed through the innovation.

Les auteurs du rapport relèvent que le manque de capacités de veille économique constitue une problématique déjà identifiée lors d’évaluations antérieures des programmes destinés aux PME, qu’elles aient été menées à un niveau européen ou national. Ils concluent en prônant la mise en place de mesures supplémentaires ayant pour objectif d’aider les PME à mieux anticiper les marchés et les technologies ou services concurrents.

Un exemple concret, donc, de l’intersection de la veille et de la valorisation de la recherche…

Sources :



Erreurs courantes dans les accords de consortium du 6e PCRD

6 10 2006

L’IPR-Helpdesk vient de publier une synthèse sur les erreurs les plus communément rencontrées dans les accords de consortium du 6e PCRD. Les « erreurs » dont il s’agit se rapportent fondamentalement à des cas où l’accord de consortium n’est pas en conformité avec le contrat prévu par la Commission, incluant des clauses qui ne sont pas autorisées par l’annexe II des conditions générales de participation.

Tout d’abord, les accords de consortium incluent souvent des termes vagues et mal définis (comme « preferential conditions », « fair and non-discriminatory conditions » ou encore « exceptional circumstances »), qui sont pourtant critiques et peuvent provoquer des malentendus entre les contractants.

Ensuite, l’article II.35.1.d) de l’annexe II stipule que les exclusions d’accès à des savoir-faire pré-existants doivent être précisées et détaillées dans le contrat, pas par une liste positive explicitant ce qui est partagé et excluant « le reste », mais une liste négative explicitant les savoirs exclus. La liste des savoir-faire éventuellement exclus doit comprendre tous les savoir-faire de la partie contractante concernée (nécessaires à la recherche) et pas seulement ceux de ses services impliqués dans le partenariat. Une exclusion donnée doit concerner tous les contractants, et non pas, par exemple, un nouveau signataire de l’accord.

Par ailleurs, les accords de consortium oublient souvent d’indiquer qu’au cas où l’un des contractants renoncerait à protéger ses connaissances, il doit prévenir non seulement les autres partenaires mais aussi la Commission, et ce avant que toute décision finale soit prise (conformément à l’article II.33.2). En ce qui concerne les publications (y compris les thèses et autres travaux universitaires), les accords de consortium doivent respecter les délais de notification et d’objection prévus par l’article II.33.3, même si les accords visent à accélerer les procédures. Le principe de protection des connaissances doit prévaloir sur le principe de publication académique.

D’autre part, les compagnies filiales sont considérées comme des tiers dans les accords. Il est donc indispensable d’établir en annexe des accords, la liste des filiales susceptibles de bénéficier de licences d’exploitation. Les contractant ont également l’obligation de prévenir la Commission si les droits d’accès accordés à ces filiales contreviennent aux intérêts de l’économie européenne. Ils doivent aussi veiller à ce que leurs accords avec leurs filiales ne vont pas contre les intérêts des co-contractants.

Enfin, dans le cadre des PCRD, le mot « utilisation » (des résultats) s’entend comme utilisation ou exploitation pour de futures activités de recherche, et non suivant le sens commun plus général.

Lire la synthèse in extenso.



Le Conseil constitutionnel ouvre la voie à l’Accord de Londres

5 10 2006

Par une décision du 28 septembre 2006, le Conseil constitutionnel français a déclaré conforme à la Constitution française ationale l’Accord de Londres du 17 octobre 2000 sur l’application de l’article 65 de la Convention sur la délivrance des brevets européens, qui doit permettre, au stade de la délivrance d’un brevet européen, de réduire de manière significative les exigences actuelles en matière de traduction.

Le 12 septembre dernier, 76 députés, à l’initiative de Jacques Myard, avaient saisi le Conseil Constitutionnel afin de faire déclarer inconstitutionnel l’Accord de Londres. Ils attiraient, de plus, l’attention sur les enjeux économiques qui s’attachent à l’Accord de Londres, considérant que sa ratification créerait un déséquilibre et placerait nos entreprises en position de faiblesse vis-à-vis des entreprises étrangères, notamment américaines. Par ailleurs, la saisine parlementaire avait été complétée par une saisine du Premier ministre interrogeant le Conseil constitutionnel sur la possibilité de ratifier l’accord de Londres sans révision constitutionnelle préalable. Au printemps déjà, un amendement de M. Fourgous à la Loi de Programme n° 2006-450 du 18 avril 2006 pour la Recherche, autorisant la ratification de l’Accord, avait finalement été rejeté.

Rappelons que l’Accord de Londres a notamment pour objectif de réduire, au stade de la validation des brevets, les exigences en matière de traduction prévues par l’article 65 de la Convention sur la délivrance de brevets européens. Pour les États, comme la France, ayant comme langue officielle l’allemand, l’anglais ou le français (langues de l’OEB), l’Accord prévoit que seule la partie du brevet correspondant aux revendications (et donc pas la partie de description de l’invention) sera traduite dans leur langue nationale. Certes, la ratification de l’Accord ne serait pas sans incidences sur les revenus des professionnels assurant actuellement ce service de traduction (conseils en propriété industrielle, etc.), mais ce manque à gagner correspondrait en revanche à de substantielles économies pour les entreprises déposant des brevets.

Les parlementaires ayant saisi le Conseil constitutionnel considéraient que l’Accord violait l’article 2 de la Constitution, qui stipule que « la langue de la République est le français ».

Le Conseil constitutionnel a rejeté la saisine s’appuyant sur le fait que :

  • les effets juridiques de la traduction en français d’un brevet européen s’inscrivent dans des relations de droit privé ;
  • l’accord n’oblige pas les agents ou services publics à utiliser une langue autre que le français ;
  • pas plus qu’il ne confère aux particuliers, dans leurs relations avec l’Institut national de la propriété industrielle, un droit à l’usage d’une langue autre que le français.

Pour mémoire, afin d’entrer en vigueur, l’Accord doit 1° être ratifié par au moins 8 des 10 États contractants : l’Allemagne, le Danemark, la France, le Liechtenstein, le Luxembourg, Monaco, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède, et la Suisse. Il doit 2° être ratifié par la France, l’Allemagne et le Royaume Uni - or parmi ces trois États, seule la France ne l’a pas encore ratifié.

Pour aller plus loin, voir le Rapport de mission de M. Georges Vianès, « Brevet européen : les enjeux de l’Accord de Londres ».

Sources :

Via PI France. Voir égalment, sur le même sujet, le billet de Pierre Breesé.



Participation difficile des PME au PCRD

1 10 2006

Les PME représentent 99% de l’ensemble des entreprises européennes et assurent environ 75 millions d’emplois. On comprend que le soutien au PME figure parmi les principales priorités de l’Union Européenne.

Malgré cela, l’étude intitulée « Vers un programme TSI favorable aux PME. Enseignements du 6e PC et recommandations politiques pour le 7e PC, avec une insistance particulière sur la situation dans les nouveaux États membres », estime que sur le terrain, l’expérience des PME montre qu’il y a encore matière à certaines améliorations. Au vu des informations reçues des PME ayant participé au 6e Programme Cadre pour la Recherche et le Développement Technologique en général, et en particulier au programme Technologies de la société de l’information (TSI), le document souligne que beaucoup de ces entreprises ont rencontré des difficultés au cours du 6e PC, et formule plusieurs recommandations afin de lever les barrières mises en évidence par l’étude :

  • améliorer l’intégration des PME dans le processus de définition des politiques au niveau communautaire, soit en finançant une représentation des PME de haute technologie, soit en encourageant les organisations existantes à éliminer les barrières à la participation ;
  • augmenter les ressources pour les priorités TSI allant dans l’intérêt des PME ;
  • améliorer la coordination entre les différents projets de soutien des PME ainsi qu’au sein des services de la Commission ;
  • réintroduire des instruments convenant aux PME, tels que les « actions de lancement » et les « primes exploratoires » (ces primes qui, dans les Programmes Cadres précédents - 22500 € dans le 5e et 45000 € dans le 4e PC), permettaient aux PME de compenser les coûts occasionnés par la recherche de partenaires et la préparation d’une proposition sur la base de l’expérience de tiers, ont été supprimées dans le 6e PC) ;
  • tenir compte de la situation financière des PME en introduisant un taux plus élevé pour les frais généraux, en améliorant leur flux de trésorerie, en clarifiant les règles financières et l’accès à la gestion ainsi qu’en explorant les voies possibles pour faciliter la sous-traitance aux PME ;
  • améliorer l’intégration des PME dans les équipes centrales des consortiums ;
  • créer un bureau de médiation pour les PME afin de régler tous les problèmes survenant durant l’exécution du projet (un code de conduite devrait être établi) ;
  • simplifier les règles et les procédures et développer des méthodes novatrices afin de réduire la charge bureaucratique pesant sur les PME.

Consulter :

Via CORDIS.



Valorisation de la recherche : point de vue du sénateur Dupont

30 08 2006

Le sénateur Jean-Léonce Dupont publie aujourd’hui dans Les Échos un point de vue, intitulé « Valorisation de la recherche universitaire : le modèle britannique ».

Autonomie, concurrence entre les universités, externalisation de la valorisation, tels sont les principaux ingrédients du succès du système britannique de valorisation de la recherche. Ils mettent en évidence certains préjugés et tabous bien français.

L’auteur développe très brièvement l’enjeu que représente l’externalisation des structures de valorisation. Mais il reste vague en ce qui concerne l’autonomie et la concurrence des universités, un manque qui affaiblit le propos et pousserait ses détracteurs à n’y voir qu’un leitmotiv purement idéologique.

Pourtant Jean-Léonce Dupont nuance lui-même, prévenant que « naturellement, il ne s’agit pas de copier un “modèle” qui comporte des limites intrinsèques » ; et il mentionne notamment le risque « que la valorisation de la recherche ne devienne un critère favorisant les sciences appliquées - plus aisément valorisables - et ne renforce la dichotomie entre “grandes” et “petites” universités ». De même, sa conclusion se veut oecuménique :

La France doit maintenir un haut niveau de recherche fondamentale et avoir pour priorité de valoriser sa recherche et de développer sa recherche appliquée, au risque sinon de voir, d’ici à dix ans, des partenaires étrangers tirer les fruits des efforts de recherche qu’elle aura financés. Il est urgent de prendre conscience de ce défi et de mettre en oeuvre les moyens de le relever.

Qu’il convienne d’allouer davantage de moyens (financiers et humains) aux activités de valorisation de la recherche, je pense que la plupart des acteurs du secteur en est aujourd’hui convaincue. En interne, et malgré leur situation budgétaire très concrainte, les universités ont déjà commencé à renforcer leurs structures. Mais la pauvreté de l’enseignement supérieur français ne sera pas résorbé par les seules activités de valorisation. Rappelons que les recettes issues des brevets universitaires restent mineures, peinant généralement à équilibrer leurs coûts de dépôt et d’entretien.

Qu’un renforcement de l’autonomie des établissements soit souhaitable : on peut espérer qu’une telle évolution s’accompagne de leur responsabilisation et d’une amélioration du rôle qui leur est accordé dans le dynamisme et le développement socio-économique local ou régional. Quant à la concurrence entre les établissements, l’invoquer à tous propos risque de nous faire oublier qu’elle existe déjà et depuis longtemps.

Un aspect que J.-L. Dupont n’aborde pas mais qui me semble essentiel en l’occurrence : nous avons en France un déficit considérable de knowledge brokers, de personnes ayant aussi bien une connaissance des besoins des entreprises que celle des chercheurs et de leurs productions, et donc étant donnée la haute spécialisation que cela suppose, des compétences pour leur compréhension respective, ce qui limite significativement le nombre d’acteurs capables d’assumer une telle démarche.



Rapport annuel 2005 de l’Office européen des brevets

1 08 2006

L’Office européen des brevets a publié il y a deux semaines son Rapport annuel présentant un compte-rendu des activités de l’OEB menées au cours de l’année dernière. Outre des informations sur les personnel (recrutements, formations, éléments de la GRH) et le rapport financier, le rapport annuel propose un certain nombre de données statistiques sur les demandes et les brevets européens - en augmentation - délivrés en 2005 par l’EOB. J’en ai fait deux graphiques :

Demandes de brevets auprès de l'OEB en 2005 par pays
Répartition thématique des demandes de brevets auprès de l'OEB en 2005

Le rapport présente aussi les nouveaux États membres de l’OEB et les derniers dévéloppements concernant le système du brevet européen, portant en particulier sur la recherche de modes d’amélioration de la coopération entre les offices nationaux de brevets et l’OEB. Il rapporte aussi les progrès vers une ratification de l’Accord de Londres, et parallèlement vers un accord instituant un système de règlement des litiges en matière de brevets européens (EPLA), ou encore les modifications relatives au règlement d’exécution du Traité de coopération en matière de brevets (PCT).



Dictionnaire trilingue en matière de brevet

16 07 2006

J’ai fait une synthèse en forme de dictionnaire trilingue en matière de brevet, à partir des archives du web et du cache de Google.

Certains termes restent encore sans traduction. N’hésitez à me laisser un commentaire si vous savez comme les traduire, je complèterai alors le dictionnaire.

Le fichier peut être téléchargé aux formats .csv (tableur), .xls (Microsoft Excel) ou .pdf.



Vers un meilleur usage des brevets au niveau européen

13 07 2006

Le numéro de juillet 2006 d’Innovation européenne (anciennement Innovation & Transfert technologique) vient de paraître. On y lit notamment un papier d’Alain Pompidou, président de l’Office européen des brevets, intitulé « Un meilleur usage des brevets ». A. Pompidou y évoque les raisons de l’importance du système de brevets pour le renforcement de l’économie européenne et ce qui doit être fait pour qu’il soit mieux adapté aux besoins des petites entreprises et des inventeurs. Selon lui (je reprends en partie ses propres termes dans ce qui suit), en plus de l’absence d’une culture européenne commune en matière de brevets, il y a aussi des lacunes structurelles qui appellent des réponses.

  • Premièrement, le système est encore grevé par d’énormes coûts de traduction pour les brevets délivrés. L’adoption du Protocole de Londres réduisant le volume de travail de traduction aboutirait à des économies de l’ordre de plusieurs centaines de millions d’euros pouvant être réinvestis dans le processus d’innovation.
  • Deuxièmement, l’absence d’un tribunal européen compétent en matière de brevets suscite des inquiétudes parmi les entreprises face au risque de contentieux, surtout les plus petites. L’adoption de l’accord sur le règlement des litiges en matières de brevets européens (EPLA) renforcerait considérablement la validité juridique des brevets européens et réduirait aussi les risques économiques associés aux contentieux.
  • Troisièmement, l’Europe a besoin d’un guichet unique pour la protection par brevet. Il pourrait être apporté par le brevet communautaire, que l’Union européenne cherche à instaurer depuis maintenant trente ans.

Le Protocole de Londres prévoit que les titulaires de brevets européens n’aient plus à produire une traduction du fascicule du brevet lorsque ce brevet a été délivré pour des États contractants de la Convention sur le brevet européen parties au Protocole de Londres et qui ont une langue de l’Office européen des brevets comme langue officielle. Dix États ont signé le Protocole en octobre 2000, mais pour qu’il entre en vigueur, il reste à être ratifié par les États contractants (ou au moins un certain nombre d’entre eux, dont obligatoirement la France, l’Allemagne et le Royaume Uni - or la France ne l’a toujours pas ratifié).

Au sujet du guichet unique, l’intégration européenne a encore un long chemin reste à parcourir en matière de brevet : si à l’échelle européenne une procédure commune existe bien pour protéger une invention par un brevet au niveau européen - ce qu’on appelle le « brevet européen » - ce dernier s’éclate au final en un brevet dans chaque pays. La proposition de « brevet communautaire » correspondrait, elle, à une protection par un titre unique dans l’ensemble des états…

Les petites sociétés et les entrepreneurs, qui représentent aujourd’hui selon A. Pompidou déjà plus de 70% des demandes introduites auprès de l’Office européen des brevets, seraient les principaux bénéficiaires de ces réformes (la suppression de la traduction correspondrait à une réduction de 25% des coûts d’un brevet). Toutefois, il me paraît important de noter que ce Protocole de Londres suscite aussi des oppositions (certains pays européens se sont ainsi immédiatement exclus du protocole), notamment du fait que le dépôt de brevets américains et japonais serait de beaucoup facilité en Europe.

Lire le papier d’Alain Pompidou.

En savoir plus sur le brevet européen et le brevet communautaire.